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GIOVANNI DOTOLI, Les plus beaux vers de la poésie française, Paris, Alain Baudry & Cie, 2012 |
Cher Monsieur Dotoli,
Vous ne me connaissez
pas mais, je vous l’affirme, nous avons un immense point commun. Nous sommes tous
deux des amoureux de la poésie française. Cela fait quelques années déjà que j’ai
le plaisir de feuilleter votre recueil des plus beaux vers et je dois dire que
vous les avez choisis avec goût. Néanmoins, je me prends la liberté de vous
envoyer ce courrier car je crois qu’il y a matière à peaufiner votre ouvrage.
En effet, il y a un auteur qu’il serait bon d’ajouter : moi-même. Sans
vouloir me lancer des fleurs (du mal), je pense mériter ma place parmi les plus
grands. Voici notamment l’un de mes meilleurs textes en alexandrins.
"Ô, chère poésie
Oui, je me permets une
toute petite parenthèse afin d’apporter une précision, avant de commencer. Avec "chère poésie", je ne veux pas dire "chère" pécuniairement, bien entendu, mais
sentimentalement. Pour ce qui est de l’aspect financier, il existe de nombreux petits
recueils à des prix fort abordables. De toutes les tailles, chez tous les
éditeurs, il y en a vraiment pour tous les goûts et pour toutes les bourses
(dont votre bel ouvrage), ce qui ne manquera pas de ravir tous les amateurs de
belles lettres.
"Ô, chère poésie
Attention, ceci n’est
pas la suite, hein. Simplement, comme j’ai fait une petite digression, je
préfère reprendre depuis le début pour ne pas briser le rythme du poème. La
musicalité des vers reste ainsi intacte, la richesse de la poésie s’exprimant idéalement
lorsqu’elle est lue d’une traite.
"Ô, chère poésie aux
strophes cristallines
Toi qui as soigné les
blessures de mon cœur
Naturellement, il
s’agit ici d’une image romantique. J’ai bel et bien eu un petit souci cardiaque
il y a quelques années mais ce n’est pas la poésie qui l’a guérit – et cela ne
diminue en rien l’affection que je porte à cette magnifique discipline. En
revanche, je profite de ce message pour adresser tous mes remerciements au
Docteur Vaillant pour ses soins, sans lesquels je ne serais peut-être plus là aujourd’hui. S’il existait un trophée de cardiologie, je suis convaincu que cet
extraordinaire médecin mériterait le "Pacemaker d’Or".
Je désirais te dire
avec ces quelques lignes
Bon, là, je sais ce que
vous pensez. Vous estimez que le verbe dire est mal choisi vu que je vous
écris. Oui mais voilà, "écrire" comporte une syllabe de plus et cela m’aurait
donc fait un pied de trop. Du coup, j’aurais dû raccourcir autre chose et écrire "ces quelles lignes", par exemple. Mais la phrase n’aurait plus eu aucun sens. Un
moment, j’ai pensé remplacer la fin par "ces beaux vers", mais alors je perdais
ma rime avec cristallines, à moins de changer tout le début, si bien qu’au bout
d’un moment, je me suis dit que c’était bien comme ça.
Je désirais te dire
Ha non. Ben non, c’est
vrai, maintenant que j’y pense, le "te" aurait été élidé et ça n’aurait pas créé
un pied excédentaire. Pour le coup, je reconnais que c’est dommage. Le vers
s’en serait trouvé plus riche. Néanmoins, je vous assure que l’intention est la
même.
Je désirais te dire
avec ces quelques lignes
Combien, ô ma poésie
Naturellement,
j’emploie ici un possessif dont le but est de marquer ma vive affection mais je
n’estime pas être l’heureux possesseur de toute la production poétique du
monde. Non, j’estime vitale et essentiel que les belles lettres de nos
grandioses auteurs (Verlaine, Baudelaire, Hugo, Johnny Hallyday, etc.) soient
partagées et accessibles à tous. Comme le dit le proverbe populaire : Qui
a poésie dans son âme possède pour toujours la flamme.
Combien, ô ma poésie,
tu fais mon bonheur
Voilà, cher Monsieur
Dotoli. C’est un véritable plaisir de partager ce petit bijou avec vous. J’imagine
que, malgré votre habitude des jolies rimes, vous devez tout de même être
impressionné par mon talent. Mais j’ai su rester modeste, ne vous inquiétez
pas. Je vous envoie néanmoins par courrier postal un document attestant de mon
droit de propriété intellectuelle sur ce texte. Je vous prierais de bien
vouloir me le renvoyer signé avant d’ajouter mon poème dans votre recueil.
Poétiquement vôtre,
Arthur Rienbeau (Bruxelles)